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mardi 26 septembre 2017

Un Conte d'Ecosse - Chapitre 2: La Veillée




Chapitre 2: La veillée

   L'énigmatique jeune fille l'amena dans une grande salle richement décorée où un feu crépitait dans une grande cheminée ornée d'un blason encadré de cerfs de pierre. Autour de ce feu étaient assis une femme d'une grande beauté, un livre à la main, un vielle homme au port noble assis sur une chaise finement sculptée ainsi qu'une nourrice d'âge mûr qui tricotait dans un coin.

- Prenez donc une chaise et venez vous réchauffer près des flammes, dit le doyen à barbe blanche.

James ne se fit pas prier et vint réchauffer ses mains et ses pieds gelés devant la flambée.

- Nourrice, allez donc demander à ce qu'un bain chaud soit préparé pour notre hôte, ainsi qu'une chambre. Monsieur est notre invité pour cette nuit. Et passez donc également en cuisine chercher de quoi le nourrir, il aura besoin de quelque chose de chaud.

La nourrice hocha la tête, posa son ouvrage et sortit de la pièce à petits pas.

- Je vous remercie pour votre hospitalité monseigneur. Mon nom est James et sans les lumières de votre château, je me serais égaré pour de bon et serais sûrement mort de froid.

- Je vous en prie, James. Mon nom est Robert McDouglas. Voici ma belle-fille Ellain et ma petite fille Grace. L'hospitalité est l'une des règles d'or de tout seigneur écossais. Même si cette règle tombe en désuétude et a été violée en quelques occasions. C'est d'ailleurs en une de ces occasions qu'un triste pan de l'histoire de ce château s'est écrit. Souhaitez-vous que je vous la raconte pour patienter ?

- Enchanté. C'est avec plaisir, j'ai toujours été un féru d'histoire et celle de ce vénérable château doit être tout à fait passionnante.

- Très bien. Je vais donc commencer.

   Le vieillard se redressa sur sa chaise, la jeune fille s'assit en tailleur dos au feu, une couverture sur ses épaules. La femme posa son livre sur ses genoux et pris une pose attentive.


   "Il y a de nombreuses années de cela, une querelle secoua les clans des Highlands. Deux clans étaient en désaccord à propos de territoires. De fil en aiguilles, cette brouille prit des proportions gigantesques et, du fait des jeux d'alliances, c'est une véritable guerre civile qui couvait. Les McDouglas, maîtres de ce château, avaient pris le partis d'être neutres: cette affaire concernait des territoires bien plus au Nord et ils entretenaient des rapports cordiaux avec des clans des deux camps. Mais cette position n'était pas du goût de tout le monde et notamment d'Adam McLeorn, le chef d'une des factions et l'un des plus belliqueux.

   Par une nuit identique à celle-ci, son fils, Brian McLeorn ainsi que quelques compagnons, demandèrent l'hospitalité pour la nuit. Ils étaient partis de Glasgow où se tenait un congrès et s'étaient perdus sur la route du Nord. Le maître de ce château leur offrit donc l'hospitalité comme le veut la tradition. Durant le repas, le sujet tomba bien sûr sur la discorde du Nord et Brian voulut connaître l'avis du seigneur sur la question. Celui-ci leur réitéra son désir de rester neutre et en dehors de cette affaire. Brian lui offrit un marché: en échange de son soutien à son clan en matériel et en hommes pour écraser l'ennemi, celui-ci, en cas de victoire, lui promis des terres et de l'or pris sur le butin des ennemis vaincus. Le seigneur, refusa, horrifié: face à la menace d'extinction des clans face aux anglais, cette guerre relevait du fratricide. Il refusait de prendre part à ce qu'il qualifiait de "guerre stupide et de déshonneur". Le jeune McLeorn tenta par de belles et douces paroles de convaincre le sieur mais celui-ci mis fin à la discussion et leur demanda de quitter sa demeure aux premières heures du levant. Le jeune homme se retira alors avec ses soutiens dans leurs appartements, fort irrité et l’œil sournois.

   Le seigneur aurait dû se méfier de ce jeune impétueux. En effet, celui-ci était venu de plein gré au château et avait reçu ordre de son père d’anéantir le château et ses habitants en cas de refus. Au plein milieu de la nuit, épée au poing, Bian McLeorn et sa troupe de mercenaire partirent pour leur funeste tâche. Ils commencèrent par assassiner le seigneur dans ses appartements, en plein sommeil, comme des lâches, puis le reste de sa famille qui était ici même pour une veillée. Tous passèrent au fil de son épée: père, femme, enfant. Ils massacrèrent ensuite le reste des habitants, violentèrent les femmes, détruisirent le mobilier, tuèrent les animaux et finirent par mettre le feu au château avant de s'enfuir dans la nuit. Au matin, il ne resta du château qu'une ruine fumante. McLeorn père, qui était malin, fit courir le bruit que le seigneur était un traître et complotait en secret avec les anglais.
C'est ainsi que s'éteignit le clan de ce château et que s'abattit le déshonneur."



- C'est une histoire terrifiante mais passionnante, je ne l'avais jamais entendue. Cela a dû demander beaucoup d'effort, de courage et de temps pour rebâtir ce château. Il est presque comme neuf. Je suppose que c'est votre ancêtre qui a hérité des terres et qui est à l'origine de cet exploit.

Le vieillard le regarda et lui sourit, sans répondre.

- Pourriez-vous me faire une promesse ?

James acquiesça .

- Ne vous inquiétez pas, je ne vous demande pas grand-chose. Je souhaite juste que vous relatiez cette histoire à qui voudra l'entendre et aux oreilles attentives. Racontez. Racontez l'histoire tragique de ce château et la trahison des McLeorn. Que ses habitants ne tombent pas dans les ténèbres de l'oubli et que la vérité soit révélée. Redorez à nouveau le blason de cette famille.

- Je n'y manquerai pas. Je vous donne ma parole.

Le vieil homme et, lui sembla-t-il, la femme et l'enfant, paraissaient soulagés. L'homme se détendit sur son siège.

- Très bien. Ah, je crois que votre dîner et votre bain sont prêts. Nous vous souhaitons une bonne nuit. Prenez des forces et reposez-vous, vous en aurez besoin.

   Le jeune homme fit ses hommages et suivit une domestique vers ses appartements. En jetant un dernier coup d’œil à l'assemblée, il lui sembla voir pour la première fois sur le visage de la femme un sourire radieux à son attention.


Suite au prochain épisode

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